mercredi 4 juin 2008

Survivre dans le monde du travail

Camille, notre It Girl, nous a déjà exposé ses techniques éprouvées pour survivre en milieu hostile dans la famille ou dans les amphis.
J'ai bien une famille, moi aussi, mais le sujet est déjà couvert. Par contre j'ai quitté il y a dix ans déjà le monde des amphis pour celui du travail.
Et le travail, en matière d'hostilité envers les intellectuELLES (et pas seulement), c'est un terrain fertile aussi.

Pendant longtemps j'ai eu de la chance. J'ai travaillé essentiellement avec des filles comme moi. Qui peuvent discuter politique ET Nouvelle Star Et techniques de drague, enfin tout, quoi.
Ce temps-là était probablement une exception heureuse. Depuis quelques années, mes collègues de travail sont d'un tout autre genre. En vrac, à titre d'exemple:
- ils ne s'intéressent pas à la politique, parce que tous les politiciens sont corrompus et ne pensent qu'à eux, pas un pour rattraper l'autre
- d'ailleurs, tant qu'on est dans la généralisation, allons-y : tous les curés sont pédophiles
- les jeunes n'ont plus aucun respect pour rien
- les gens sont paresseux, plus personne ne veut travailler
- on devrait rétablir la peine de mort
- ça irait beaucoup mieux si on n'acceptait pas tous ces étrangers
etc, etc...

Alors, avec les collègues, il y a un premier type d'attitude à adopter, c'est la technique "du hibou". A savoir, tu t'assieds dans un coin, tu écoutes (ou même pas) et tu ne dis rien.
Ca peut marcher, sauf que si tu passes 8 heures par jour avec des gens à qui tu n'adresses pas la parole, ta vie va vite devenir un enfer. D'abord, si tu es un tant soit peu un être social (comme l'est l'humain, en principe),
tu vas vite trouver ça pénible. Mais surtout, les gens vont te trouver hautaine. Et quand tu auras un truc tout à fait professionnel à leur demander, tu ne risque pas qu'ils te mettent en tête de leur liste de priorités.
Et ça, ça craint. Parce que quand-même, même quand tu es sous-fifre au dernier degré, on te paye pour que tu obtiennes des résultats. Et si toute collaboration est impossible, tu vas te retrouver à l'anpe en moins de deux.
Bon.
Une autre technique serait de rentrer dans leur jeu et d'acquiescer dans toutes les conversations, mais personnellement ça heurte mon éthique de faire semblant d'être ce que je ne suis pas. Puis ça m'emmerde profondément et la vie
est déjà bien assez compliquée sans qu'on s'emmerde encore en plus.

Donc j'ai mis au point 2 autres techniques:

- la première est une variante de la technique "du hibou", à savoir que si un sujet qui me fâche vraiment arrive sur le tapis, j'affiche un air concerné par la discussion mais je ne participe pas. Si on m'interpelle je dis que je n'ai pas d'avis
(mais c'est à utiliser avec modération, les gens refusent souvent de croire qu'on n'a pas d'avis évidemment).
- la seconde, que je commence à vraiment bien maîtriser, consiste à être celle qui lance les sujets de discussion. Et vous n'avez pas idée du nombre de sujets qu'on peut encore aborder quand on ne souhaite pas polémiquer! En vrac:

  • la météo et les prévisions pour le week-end
  • les résultats du sport (avec les hommes, surtout)
  • un petit potin bien people de temps en temps
  • l'enfer que nous fait vivre le nouveau système informatique
  • les projets pour le week-end ou les vacances
  • les enfants (je n'en ai pas, je lance juste le sujet et toutes les mères commencent à parler des leurs, c'est très facile)
  • comment nos amis qui travaillent ailleurs gagnent plus et ont plus de jours de congé que nous et que c'est trop injuste

Enfin bref, que des sujets terriblement consensuels sur lesquels tout le monde sera d'accord et qui généralement n'impliquent de dire du mal de personne.
Pas de polémique, pas de disputes.

Résultat: comme vous êtes celle qui lance toujours des conversations si passionnantes, on s'ennuie terriblement les jours où vous n'êtes pas là, et on finit par vous trouver super sympa et pas du tout bêcheuse.
Bref, on vous aime. On vous rend service quand vous demandez. On vous sourit tout le temps.

Mission accomplie.

Bien entendu je ne pousse pas le vice jusqu'à aller boire des pots avec eux le soir ou à garder contact quand je quitte la boîte, ça, c'est pour les vrais amis et je ne suis pas hypocrite. Ca n'est que du boulot.
Mais croyez-moi, ça améliore vachement votre qualité de vie au travail.

Sur ce, je vais aller regarder "C dans l'air", mais il ne faut pas le dire à mes collègues.

Lullaby